Mariage et entreprise : choisir le bon régime
Le mariage, c’est aussi adopter un régime matrimonial. Découvrez les options existantes, ainsi que leurs avantages et inconvénients selon le type d’entreprise.
Qu’est-ce qu’un régime matrimonial ? Quels en sont les enjeux ?
C’est un ensemble de règles qui déterminent la propriété et la gestion des biens des époux, le paiement des dettes, ainsi que le partage des biens à la fin du mariage. Tous les couples mariés en ont un. Il en existe deux grandes catégories :
- le régime “légal”, qui s’applique automatiquement aux époux n’ayant pas conclu de contrat de mariage (plus de 80 % des cas). Les règles de ce régime sont fixées par la loi ;
- les régimes “conventionnels”, plus modulables. Certains préfèrent signer un contrat de mariage notarié et adapter leur régime matrimonial. Celui du chef d’entreprise a de nombreuses incidences sur sa vie professionnelle. Mal adapté, il peut être contraignant ou risqué pour son conjoint. C’est pourquoi il apparaît utile de présenter les différentes options.
Le régime légal de communauté, le plus courant
C’est le régime attribué par la loi aux époux mariés sans contrat de mariage. Pour ceux mariés depuis le 1er février 1966, il s’agit du régime de la communauté réduite aux acquêts.
Propriété des biens
Biens communs
Tous les revenus du couple (bénéfices, salaires, loyers, etc.) perçus au cours du mariage sont communs, même s’ils proviennent de biens propres à l’un des époux et ont été acquis durant le mariage. Ainsi, un commerce créé ou acheté après le mariage par l’un d’entre eux est un bien commun, sauf s’il utilise des biens propres et le déclare expressément dans l’acte. Il en est de même des parts de société souscrites pendant le mariage, même si elles sont à son nom.
Biens propres
Les biens que chaque époux possédait avant de se marier lui appartiennent en propre après le mariage, tout comme ceux reçus au cours du mariage par donation ou succession. Ainsi, un commerce créé par l’un avant de se marier ne devient pas un bien commun. S’il le vend et achète un autre bien avec le produit de la vente, ce dernier lui sera également propre, à condition de déclarer expressément lors de cet achat que les fonds proviennent d’un bien propre.
Gestion de l’entreprise
Entreprise individuelle
- Époux exerçant une activité séparée : celui commerçant gère seul le fonds de commerce, même s’il s’agit d’un bien commun. Mais pour les actes importants (ventes, donations, hypothèques) portant sur un immeuble, un fonds de commerce ou des parts sociales relevant des biens communs, il doit obtenir l’accord de son conjoint.
- Époux collaborant à l’activité de son conjoint exploitant : lorsqu’il travaille avec lui dans le commerce qui fait partie des biens communs, il doit consentir à la vente ou au nantissement d’éléments du fonds nécessaires à l’exploitation.
Société
Un époux ne peut pas, sans l’accord de son conjoint, apporter en société un fonds de commerce ou un immeuble constituant un bien commun. En revanche, il peut seul acquérir des parts de société ou faire un apport en numéraire à une société. Mais si le financement est effectué au moyen de deniers communs, et s’il s’agit d’une société à responsabilité limitée, d’une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée ou d’une société en nom collectif, il doit en aviser son conjoint. Ce dernier peut revendiquer la qualité d’associé pour la moitié des parts acquises.
Dettes professionnelles
Lorsqu’un époux commerçant contracte une dette pour son activité professionnelle, ses créanciers professionnels, à l’exception du Trésor public et des Urssaf, ne peuvent exercer de poursuites que sur son patrimoine professionnel, sauf en cas de renonciation du commerçant à la séparation des patrimoines. Peu importe que les biens soient propres ou communs, exception faite des gains et des salaires provenant de l’activité professionnelle de son conjoint.
En résumé, le régime de communauté peut présenter des inconvénients, notamment faire courir des risques financiers au conjoint. Aussi, il est souvent conseillé aux futurs époux d’adopter un régime matrimonial séparatiste.
Deux catégories de régimes matrimoniaux, légal et conventionnels
Pour rappel, il existe deux grandes catégories de régimes matrimoniaux : le régime “légal” et les régimes “conventionnels”. Dans ce second article (le premier est paru dans le numéro 364-365 des mois de janvier-février), nous allons aborder les régimes matrimoniaux conventionnels. Ceux-ci sont adoptés soit en concluant avant le mariage un contrat de mariage devant notaire, soit en mettant en œuvre, après le mariage, une procédure de changement de régime matrimonial.
Le régime de séparation de biens : des patrimoines bien cloisonnés
Propriété des biens. Les patrimoines du couple marié sous le régime de la séparation des biens sont cloisonnés : chacun est propriétaire de ceux qu’il possédait avant comme de ceux acquis après le mariage. L’entreprise créée ou achetée par un seul des époux lui appartient en propre (même si les deniers lui ont été fournis par son conjoint). Toutefois, s’il n’y a pas de biens communs, comme dans les régimes communautaires, il peut y avoir des biens indivis : ce sont ceux acquis et financés par les deux époux.
Gestion des biens. Chaque époux peut gérer librement son patrimoine et en disposer seul. Il a tous pouvoirs sur les biens professionnels qu’il a créés ou acquis seul.
Dettes professionnelles. Chacun est responsable de ses dettes professionnelles. Il n’engage que ses biens : s’il se porte caution ou s’il emprunte seul sans son conjoint, les créanciers ne pourront pas agir contre ce dernier. Mais, pour contourner cette difficulté, les banquiers demandent souvent au conjoint du commerçant de se porter caution ou co-emprunteur de celui-ci.
En résumé, ce régime convient aux époux qui ont une activité professionnelle séparée et des revenus comparables, mais lorsqu’un seul des deux travaille il ne permet pas au conjoint de profiter de son enrichissement. Aussi, le couple marié peut-il choisir le régime de participation aux acquêts, intermédiaire entre celui de communauté et celui de séparation de biens.
Le régime de participation aux acquêts : partager l’acquis
Durant le mariage, ce régime fonctionne selon les règles de celui de séparation de biens. Mais contrairement àce dernier, à la fin du mariage, chaque époux bénéficie de l’enrichissement de l’autre : il a droit à la moitié de la différence constatée entre le patrimoine détenu par son conjoint à la fin et celui possédé au début du mariage, augmenté des biens reçus pendant par donation ou succession. En résumé, ce régime est relativement complexe à liquider mais il assure une bonne protection des intérêts respectifs des époux.
Le régime de communauté universelle : tout mettre en commun
Propriété des biens. Tous les biens possédés par chacun des époux avant le partage et après le mariage sont communs aux époux dans le régime de communauté universelle, sauf exclusion par une clause du contrat de mariage.
Gestion des biens. Les règles de gestion du régime légal de communauté s’appliquent.
Dettes professionnelles. Le recouvrement de toutes les dettes des époux, y compris celles professionnelles, peut être poursuivi sur tous les biens communs. Toutefois, en cas d’emprunt ou de caution souscrit(s) par un seul époux, ne sont engagés que ses revenus et ses biens propres, sauf en cas de consentement de son conjoint. Ce régime est donc déconseillé aux personnes qui sont encore en activité professionnelle, en raison des règles relatives aux dettes.
En résumé, le choix du régime matrimonial adapté dépend de la situation des époux, de leur activité professionnelle, de leur âge, de leur fortune personnelle, de leur situation familiale antérieure (existence d’enfant d’un premier mariage, par exemple) et de la volonté de préserver le conjoint survivant en cas de décès.